Risque pays : Espagne

Malgré les défis mondiaux persistants, l'économie espagnole a fait preuve de résilience et a surperformé par rapport à ses pairs ces dernières années. Elle a enregistré une croissance robuste en 2024, soutenue par une consommation privée et publique solide, tandis que l'investissement et le commerce extérieur se sont révélés plus volatils.

À l'avenir, l'activité économique de l'Espagne sera toujours soutenue par le rebond de la demande intérieure. Une consommation des ménages renforcée, alimentée par une augmentation du revenu réel due à des taux d'inflation plus bas, à la création d'emplois et à la croissance des salaires dans un marché du travail robuste, jouera un rôle significatif. De plus, la formation brute de capital fixe contribuera substantiellement à la croissance, stimulée par les projets d'investissement du NGEU, avec des dépenses liées qui devraient se rattraper en 2025-2026. Bien que la demande extérieure nette s'améliore à court terme, sa contribution globale à la croissance du PIB sera plus modérée par rapport aux années précédentes, car une augmentation des exportations de biens et de services non liés aux voyages sera compensée par une hausse des importations (liée, entre autres, à l'augmentation de la teneur en importation de la formation brute de capital fixe) et un plateau des exportations de services de voyage. En 2025, nous prévoyons que l'Espagne marquera sa cinquième année de surperformance de la croissance du PIB par rapport à la moyenne de la zone euro, mais le rythme se modérera : +1,8 % en 2025 et +2,0 % en 2026.

L'inflation a augmenté au cours du dernier trimestre de 2024 après avoir atteint son niveau le plus bas depuis le début de 2021 en septembre 2024. L'inflation globale devrait rester sur une légère tendance à la hausse au début de 2025, puis reprendre une trajectoire à la baisse plus tard dans l'année. Nous prévoyons que l'inflation atteindra 2,1 % en 2025 et 1,9 % en 2026, après 2,7 % en 2023.

Parallèlement, le marché du travail a montré des développements positifs, principalement grâce à la réforme du marché du travail de 2021 qui a contribué à réduire le dualisme entre le travail permanent et temporaire, ainsi qu'à de grands flux migratoires. La création d'emplois a accéléré en décembre 2024, ajoutant 35 500 nouveaux travailleurs enregistrés, contre 29 900 enregistrés au cours du même mois de 2023. Ainsi, le marché du travail espagnol a terminé l'année avec une augmentation de plus de 500 000 nouveaux travailleurs enregistrés. Enfin, le nombre de personnes au chômage a diminué de 25 300, portant le total à 2,56 millions, le chiffre le plus bas depuis décembre 2007. Cependant, des défis structurels restent à relever : le chômage demeure élevé par rapport aux pairs et la productivité est faible.

L'Espagne n'a pas respecté le délai du 15 octobre pour présenter son prochain projet de budget, ce qui a entraîné l'extension du budget 2024 jusqu'en 2025. Le déficit général du gouvernement a probablement atteint 3,0 % du PIB en 2024, influencé par la suppression progressive des mesures visant à atténuer les prix élevés de l'énergie. Ce déficit devrait légèrement diminuer en 2025 et se stabiliser en 2026 en raison d'un ralentissement des dépenses primaires dans un contexte de forte croissance des recettes fiscales. En attendant, le ratio de la dette par rapport au PIB devrait diminuer progressivement en 2025, puis se stabiliser autour de 100 % en 2026. L'Agence fiscale a terminé 2024 avec un recouvrement record approchant les 300 milliards d'euros, bien que la charge fiscale moyenne soit restée inférieure à la moyenne de l'UE, qui est de 37 % du PIB en 2023.

Plusieurs augmentations d'impôts ont été mises en œuvre en 2025, affectant à la fois les particuliers et les entreprises, dans le but de générer 4 500 millions d'euros supplémentaires par an, comme le prévoit le Plan fiscal structurel du gouvernement. De plus, le début de la nouvelle année a marqué la cessation de certaines mesures d'aide contre l'inflation qui étaient en vigueur ces dernières années, bien que les subventions de transport se poursuivront pendant six mois supplémentaires.

L'Espagne est classée 31ème sur 190 économies dans le classement de la Banque mondiale sur la facilité de faire des affaires, devançant d'autres grandes économies européennes telles que la France (33), l'Italie (58) et le Portugal (39). Malgré les réformes depuis la crise de 2008-09, des faiblesses structurelles persistent, notamment une dépendance excessive au tourisme et des inefficacités sur le marché du travail.

L'Espagne fait face à des risques plus élevés pour l'emploi, compte tenu de la prédominance des PME, qui sont plus vulnérables aux chocs de liquidité, ainsi que de la part élevée de contrats temporaires. L'Espagne dépend davantage de la demande et de l'offre de l'UE que d'autres pays, et les prix de l'énergie ont augmenté plus rapidement que dans l'ensemble de la zone euro, ce qui aggrave l'équilibre des risques. En conséquence, des secteurs tels que le transport, l'industrie électro-intensive et la construction pourraient être significativement affectés.

La stabilité politique en Espagne devrait rester fragile, même après la réélection de Pedro Sánchez, le leader du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), en tant que Premier ministre à la mi-novembre 2023. Le gouvernement est susceptible d'être intrinsèquement instable en raison de sa dépendance à un grand nombre de partis régionaux, chacun ayant ses propres intérêts concurrents. Cette situation augmente considérablement le risque de paralysie politique et le potentiel d'effondrement du gouvernement avant la fin de son mandat en 2027.

Enfin, l'utilisation efficace des fonds du NGEU par l'Espagne est cruciale pour soutenir sa reprise économique et sa croissance à long terme, en répondant aux défis structurels et en assurant un avenir plus durable et inclusif. Dans le cadre de l'instrument NGEU, l'Espagne est l'un des principaux bénéficiaires, devant recevoir 160 milliards d'euros de prêts et de subventions jusqu'en 2026. L'impact transformateur du plan espagnol découle d'une combinaison robuste de réformes et d'investissements conçus pour répondre aux défis spécifiques du pays. Les réformes visent à éliminer les goulets d'étranglement à une croissance durable et durable, tandis que les investissements sont stratégiquement ciblés pour accélérer la transition vers une économie plus durable, à faible émission de carbone et résiliente au climat. De plus, ils cherchent à maximiser les avantages de la transformation numérique et à garantir la cohésion sociale. Le plan met également l'accent sur l'amélioration de la connectivité à l'intérieur du pays, le renforcement de la performance du marché du travail, l'augmentation de la capacité d'innovation de l'économie et la rend plus efficace et durable.